Les défenses font-elles gagner les Super Bowls?

Un ami m’a toujours dit « ce sont les défenses qui gagnent les Super Bowl ». Malgré tout, ESPN (et son système Football Power Index) valorise l’attaque plutôt que la défense.

L’adage “Defense wins championships” est gravé dans la culture du football américain. De Bear Bryant à Bill Belichick, en passant par les analystes et les commentateurs, tous l’ont cité au moins une fois. Mais à l’ère des attaques aériennes spectaculaires et des quarterbacks stars, cette idée tient-elle toujours ?

La défense c’est…

Le socle de la constance

Gagner un Super Bowl, ce n’est pas une question d’un seul match. Il faut réussir à enchaîner trois voire quatre victoires de très haut niveau face aux meilleures équipes de la ligue. Et dans ces moments intenses, la défense offre une stabilité précieuse. Quand l’attaque est en difficulté, une bonne défense permet de rester dans le match. Prenons l’exemple des Chiefs en 2023 : Chris Jones a neutralisé l’attaque des Bengals dès le début du match de finale AFC. Ce genre d’action peut inverser le momentum. La défense des Chiefs a d’ailleurs été l’un des piliers de leurs deux titres consécutifs.

La première attaque

Une défense efficace, ce n’est pas seulement empêcher l’adversaire de marquer. C’est aussi offrir des opportunités à son attaque. Une interception, un fumble récupéré, une 4e tentative stoppée : autant de moments qui peuvent changer le cours d’un match. En 2022, une interception clé des Bengals contre Kansas City a directement mené à un touchdown égalisateur et à une victoire en finale AFC. De plus, une défense solide améliore la position de départ de l’attaque sur le terrain. Moins de yards à parcourir, plus de points à la clé. Une bonne défense, c’est aussi moins de points encaissés et donc moins de boulot pour l’attaque qui peut se contenter de marquer moins de point. C’est mathématique.

La base

Dans toutes les disciplines collectives, la défense joue un rôle stratégique fondamental. En NFL, une défense bien coachée peut complètement faire déjouer un adversaire, même très talentueux. Cela crée une pression psychologique, casse le rythme et impose un tempo plus favorable. La défense, c’est ce qui permet de tenir quand le reste ne fonctionne pas. À l’image du gardien en hockey ou du verrouillage défensif en basket, une grande défense est souvent la base d’un titre.

Mais…

Ce que les chiffres disent

Une analyse approfondie des 45 premiers Super Bowls montre que les équipes avec une défense classée dans le top 10 en ont remporté 38… mais les équipes avec une attaque dans le top 10 également. Autrement dit, la corrélation entre performance défensive et victoire finale existe, mais elle n’est pas plus forte que celle liée à l’attaque. Et une corrélation ne fait pas office de causalité. Les équipes équilibrées, excellentes des deux côtés du ballon, sont celles qui vont au bout.

Si on analyse la place du vainqueur du Super Bowl parmi les meilleurs attaques/défenses de la saison, on remarque que la tendance est à la baisse. La tendance est à une meilleure attaque et à une meilleure défense. Cependant, la tendance est légèrement plus forte pour l’attaque.

Le football, il a changé

Depuis une dizaine d’années, les règles évoluent pour protéger les joueurs offensifs. Résultat : les attaques prennent le dessus. Le jeu est plus rapide, plus aérien, plus spectaculaire. Tom Brady, Patrick Mahomes, Joe Burrow ou encore Josh Allen incarnent cette nouvelle ère. Et les défenses, aussi bonnes soient-elles, ont bien du mal à contenir ce feu d’artifice offensif. Voici un aperçu plus détaillé :

  1. Le kickoff : Depuis 2024, la NFL s’est inspirée de la XFL pour réinventer le coup d’envoi. Les joueurs des deux équipes sont désormais alignés plus près les uns des autres et ne peuvent bouger qu’une fois le ballon touché. Cette configuration réduit les collisions violentes et augmente le nombre de retours, rendant le jeu plus dynamique et plus sûr. Avec un touchback, le ballon est remis aux 35 yards contre 25 précédemment.
  2. Interdiction des plaquages en « hip-drop » : Ces plaquages, où le défenseur s’accroche au porteur de balle puis se laisse tomber sur ses jambes, sont désormais interdits. L’objectif : réduire les blessures graves aux jambes.
    Pénalité : 15 yards et first down
  3. Replay élargis aux quaterbacks : Les replays peuvent désormais être utilisés pour vérifier si un quarterback était à terre ou hors des limites avant de lancer une passe, offrant une protection accrue contre les pénalités injustifiées.

La défense surévaluée

Les grandes défenses marquent les esprits, car elles sont exceptionnelles. On se souvient des Bears de 1985 ou des Broncos de 2015. Mais l’influence offensive, bien que plus fréquente, n’est pas moins décisive. Elle est simplement moins “spectaculaire” sur le plan narratif. Cela pousse certains observateurs à surévaluer l’impact de la défense, alors qu’en réalité, les deux aspects du jeu sont tout aussi cruciaux.

Conclusion

La défense reste un pilier pour décrocher un titre : elle impose de la rigueur, de la constance, et peut faire tourner un match à elle seule. Mais dans la NFL d’aujourd’hui, une attaque performante est devenue quasi indispensable. Le plus souvent, c’est l’équipe qui allie les deux qui l’emporte. Et s’il faut trancher entre une grosse défense ou une attaque de feu, mieux vaut miser sur l’attaque à l’ère moderne.

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